N’ayez pas peur !

Avec d’autres expressions de même sens comme « Ne craignez pas », « Soyez sans crainte », c’est le commandement le plus répété dans la Bible ! … on l’y compterait 365 fois, comme pour dire la pertinence quotidienne de ces mots inauguraux du pape Jean-Paul II : « N’ayez pas peur ! » (22 octobre 1978). La Bible révèle un Dieu qui veut conjurer la peur chez l’homme, non pas pour l’en exempter – il est naturel d’avoir peur d’un danger ou d’un mal -, mais pour que la peur ne dicte plus nos décisions, ne nous fasse plus « perdre cœur » c’est-à-dire le courage, la vertu d’agir malgré la peur.

Or si toute peur – de perdre, de souffrir, de rater, de manquer… – s’enracine dans LA peur fondamentale qu’est la peur de la mort, les chrétiens qui croient en la résurrection parce qu’ils croient en celle du Christ, devraient en droit être reconnaissables à ce courage, sans pourtant que celui-ci soit leur monopole : tout homme capable de faire de sa mort un acte plus sensé que la-survie-à-tout-prix, qu’il s’agisse du fanatique ou du suicidaire, du martyr ou du djihadiste, du héros ou du sage, cet homme-là non plus ne se laisse plus déterminer par la peur, aussi obsédante soit-elle.

Il y a donc courage et courage, comme par exemple, selon Jean Jaurès, celui de persévérer dans le bien, même modeste, autant que dans la visée de l’idéal. Pour le chrétien, si la foi le met en lien personnel avec Jésus-Christ vivant, si le baptême le plonge dans la mort et la résurrection du Christ, si comme le dit frère Christian de Chergé au moine qui s’interroge devant la perspective du martyre : « Ta vie, tu l’as déjà donnée », non seulement par la consécration mais par le baptême [cf. le film Des hommes et des dieux], cette foi chrétienne devrait non seulement libérer de toute peur, mais conduire au Christ, à celui-qui-nous-a-donné-sa-vie-par-amour et qui nous donne la liberté de faire pareil à sa suite : « Jésus par sa mort, a pu réduire à l’impuissance celui qui possédait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable, et il a rendu libres tous ceux qui, par crainte de la mort, passaient toute leur vie dans une situation d’esclaves ». (He 2,14-15)

Bien des obstacles peuvent limiter de fait cette liberté, y compris chez les chrétiens. Dans son discours à l’université de Harvard (8/6/1978), la même année que le début du pontificat de Jean-Paul II, Alexandre Soljenitsyne, le célèbre dissident expulsé d’URSS, l’auteur de l’Archipel du Goulag, s’adressant à ceux qui représentaient l’Occident, le camp de la liberté, de la démocratie, faisait ce diagnostic : « Le déclin du courage est peut-être le trait le plus saillant de l’Ouest aujourd’hui pour un observateur extérieur ». Il y a des raisons à cela en Occident : l’éloignement de la mort (guerre, famine, maladie) puis son déni – que l’historien Guillaume Cuchet repère jusque dans la disparition du thème des « fins dernières » ou de l’au-delà dans la prédication des années 60 -, le primat de la revendication de ses droits sur la reconnaissance de ses devoirs, le désintérêt pour le bien commun et le repli individualiste sur la sphère privée qu’avait entrevus Tocqueville comme les périls d’une société démocratique, le bien-être d’un consumérisme outrancier qu’une dialectique du maître et de l’esclave finira par renverser…

Ne plus avoir de passion ou de cause qui justifie qu’on lui consacre sa vie, ni de devoir susceptible d’exiger qu’on fasse le sacrifice de sa vie, fait alors du maintien de son bien-être, de sa survie – ou de ceux de ses proches – la seule fin qui vaille qu’on lui sacrifie tout le reste. Sans la verticalité d’une transcendance appelant au dépassement de l’intérêt de l’individu ou du groupe, ne demeure que la réflexivité soucieuse de soi ou l’horizontalité grégaire du groupe. La crise pandémique actuelle et son traitement précautionneux si coûteux illustrent ainsi notre-hantise-de-la-mort, ou plus exactement la-hantise-de-notre-mort, car la mort lointaine des autres nous dérange peu : 25.000, le nombre des morts du corona-virus en France en trois mois de pandémie, c’est le nombre de ceux qui meurent de faim chaque jour dans le monde, alors qu’une infime fraction des efforts consentis ces jours-ci suffirait à les éviter… [cf. l’édito de Frédéric Boyer (La Croix)]

Les Anciens nous apprennent que la vertu de prudence – qui est la sagesse pratique dans l’action et non pas la précaution et encore moins l’évitement de tout risque – va avec les trois autres vertus cardinales de justice – qui s’attelle au bien d’autrui et pas seulement au sien propre -, de force – c’est-à-dire de courage face à la difficulté et ultimement face à la mort – et de tempérance – et notamment de frein mis à nos appétits égoïstes. Puissions-nous apprendre que la vie vaut « ce que nous sommes capables de risquer pour elle » (Hegel), ou de manière plus évangélique, ce pour quoi on est prêt à la donner, en entendant du Christ : « celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera » (Mc 8,35). Comme bien des professions l’ont montré dans ce temps de confinement, le don désintéressé de nous-mêmes, l’oubli de soi, la préoccupation pour les plus malheureux, le sens du sacrifice seront indispensables pour sortir de cette crise.

[cf. un article sur ce que nous apprend La Peste de Camus]

Croire…

Un covoiturage récent Rodez-Paris m’a donné l’occasion d’une discussion passionnante avec l’une de mes passagères. Six heures de trajet, cela donne du temps pour parler de beaucoup de choses : de l’AC (ou ‘art contemporain’, qui me semble surtout celui de faire mousser du vide, et de spéculer là-dessus), de l’éducation populaire, de nos histoires familiales, de la foi également.

Interrogé sur l’hypocrisie supposée des croyants, non seulement parce qu’ils ne mettent pas leurs actes en conformité avec ce qu’ils croient, mais plus encore, parce que leurs pratiques miment la foi et qu’ils ne croiraient pas vraiment ce qu’ils croient, j’ai répondu que l’enjeu n’est pas tant d’être sûr que Dieu existe, mais d’y croire, au sens d’être tendu vers lui, de ne pas se résoudre à ce qu’il nous échappe, et de préférer la pauvreté d’une foi qui trime, à la médiocrité de se contenter de biens relatifs. Agir ou penser autrement serait verser dans l’idolâtrie, car ne pas croire en Dieu, ce n’est pas croire que Dieu n’existe pas, c’est se donner un autre objet d’attachement, et l’AC démontre que du néant, du transgressif, du noir… peuvent sembler faire l’affaire.

Croire en Dieu, c’est être dans une quête qui donne de mettre tout bien à sa juste place, sans l’absolutiser. C’est se disposer à une rencontre certes rare, mais dont la survenue de loin en loin a tellement de valeur qu’elle suffit à faire persévérer fidèlement aux gestes et pratiques qui disent à Dieu notre disponibilité à l’accueillir.

Lectio Divina

« Le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit » (Jn 14,26) nous dit le Christ.

L’Esprit Saint, ce défenseur, au sens d’avocat (paracletos dans le texte grec de l’évangile), ou ce souffleur, au sens de celui qui aide à la récitation d’un texte appris par coeur (paraclita), est le grand enseignant par qui la parole biblique lue, entendue ou méditée, donne au croyant accès au tout du Christ, et par suite à Dieu qui se révèle en lui.

L’étonnant est alors non pas que Dieu se révèle en Jésus-Christ, mais que le Christ se dise dans le langage humain si imprécis, si ambigu ; que l’infini se dise dans le fini ; que quelques mots, pages, livres bibliques… et l’Esprit Saint suffisent pour nous faire rencontrer le Christ ! C’est ce qui motive moines et moniales à donner tous les jours tant de temps à la Lectio Divina, la lecture priante de la Bible… Et nous qui négligeons cette source à notre portée…

Voici alors un petit conseil de lecture : commencez par l’Evangile selon Saint Luc – c’est en le lisant en entier que je suis redevenu chrétien – puis les Actes des Apôtres, et découvrez-y, goûtez-y l’action de l’Esprit Saint !

Obélix dans la foi ?

« Tu m’as séduit(e) et je me suis laissé séduire. » (Jr 20,7)

Voilà comment Estela, 14 ans, concluait sa profession de foi juste avant d’être baptisée pendant la veillée pascale à Baraqueville. Après des années de catéchuménat, sa soeur, Serena, étudiante, se présentait en même temps au baptême avec « l’humilité d’un enfant. » Deux démarches avec moult questions sur la vie, l’engagement, l’amour… avec des rencontres, des lectures, des réponses qui ne font qu’aiguiser la curiosité, des moments de prière et de célébration, l’accompagnement de l’Eglise avec diverses aumôneries, mais aussi la place du scoutisme comme éveil au service, à la joie, à la Création.

La démarche de ces catéchumènes, comme celle des 5000 adultes qui ont été baptisés en France à Pâques, interroge les « chrétiens de chrétienté » que nous sommes pour la plupart, et dont l’identité chrétienne ne résulte pas tant d’une recherche ou d’un questionnement, que de la perpétuation plus ou moins active d’un héritage.

A la différence d’Obélix, qui était tombé dans la marmite de potion magique quand il était enfant, ces nouveaux baptisés nous provoquent à la décision : si nous n’étions pas baptisés enfants, choisirions-nous d’être chrétiens ? la foi en Christ est-elle pour nous une chance ? sommes-nous prêts à la partager aux autres ?

La foi chrétienne en 5′

26 images pour dire la foi chrétienne en 5'Pour préparer une exposition sur la foi chrétienne, à l’occasion de la rencontre des « Religions pour la Paix », il a fallu rédiger un exposé de « la foi chrétienne en 5 minutes ». En voici le résultat, réalisé avec les corrections d’une équipe de laïcs. Il développe ce qui avait été fait précédemment sous le titre « La foi en 10 images« .

A télécharger :
– 9 panneaux d’exposition (texte légèrement modifié) : ICI
– livret 8 pages A6 portrait (à partir de 2 feuilles A5 paysage recto-verso), pdf prêt à imprimer : ICI
– album des images associées à chaque paragraphe : ICI

 

1. Dieu le Père

La contemplation de l’univers, la confrontation aux grandes questions de l’existence, la vie et la mort, le bien et le mal, l’amour, la liberté, la vérité… tout cela suscite en l’homme une interrogation, voire une intuition religieuse : au fondement et au-delà de toute chose, y au­rait-il une réalité absolue, éternelle, infinie… divine ?

A la suite d’Abraham, le peuple d’Israël a expérimenté dans la rudesse de son histoire, la proximité aimante de cette réalité : un Dieu créateur, libérateur, sauveur, donnant la vie et se révélant en personne pour faire alliance avec l’humanité. Un Dieu qui par ses promesses dynamise l’histoire, et qui par ses exigences liant foi en lui et souci du pro­chain, rend l’homme capable de lui répondre amour pour amour.

Avec les juifs et les musulmans, les chrétiens croient en un seul Dieu créateur. Ils le nomment même Père, lui dont la toute-puissance, la sainteté et la grandeur sont celles de l’amour, avec ce que cela implique de miséricorde et de fécondité, de force et de vulnérabilité.

 

2. La Bible, Parole de Dieu

Le Dieu des chrétiens se révèle dans l’histoire d’un peuple, Israël, et au cœur de ce peuple, dans celle d’un homme, Jésus de Nazareth, en qui Dieu a tout dit de lui-même. La relecture de cette histoire, pour y repérer les traces de la présence de Dieu a donné lieu à divers témoignages, oraux puis écrits. Dans cette bibliothèque, une diversité d’expérien­ces de Dieu sont relatées, conservées, sélectionnées pour constituer la Bible.

Nous pouvons puiser dans ce trésor pour discerner dans nos vies ce qui relève de Dieu ou au contraire d’une illusion, d’une vue partiale ou partielle (hérésie) du mystère.

La Bible comporte des paroles humaines certes, mais inspirées. Pour les chrétiens, Jésus-Christ est La Parole de Dieu faite chair. La Bible n’est « Parole de Dieu » que par analogie, par l’accès incontournable qu’elle donne au Christ, par son annonce (Ancien ou Premier – Testament), et le témoignage de ses 1ers disciples (Nouveau Testament). « Ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ. » (Saint Jérôme)

 

3. Jésus-Christ, Dieu fait homme

L’alliance de Dieu avec l’humanité atteint son sommet indépassable en Jésus-Christ. En Jésus se réalise la promesse faite à Israël d’une parfaite communion entre Dieu et l’homme. En Jésus, Dieu se fait homme, et c’est en contemplant son humanité que l’on découvre en plénitude qui est Dieu. Alors que « Dieu, personne ne l’a jamais vu » (1Jn 4,12), le Christ nous montre le Père à l’œuvre en lui, et la paternité de Dieu à l’égard de tous.

Sa relation unique au Père le fait reconnaître comme Fils unique de Dieu. Sa relation unique aux hommes, et en particulier aux exclus, aux pauvres, et aux pécheurs, leur manifeste leur dignité d’en­fants de Dieu et leur donne de vivre comme tels, « par lui, avec lui et en lui ». Sa manière de vivre manifeste que la loi, les commandements de Dieu sont seconds par rapport à l’initiative gratuite, à l’amour indéfectible de Dieu pour l’humanité.

Écouter l’enseignement du Christ, devenir son disciple, l’imiter et plus encore le laisser faire alliance avec nous et pouvoir dire avec Saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20), tel est le programme de vie du chrétien.

 

4. La Passion du Christ

Jésus pose tout au long de sa vie publique des signes, des miracles qui manifestent que Dieu veut l’homme debout, restauré dans sa dignité inaliénable de fils de Dieu, et que « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant » (Saint Irénée). La lutte contre le mal et la souffrance est une constante dans sa vie.

Pourtant, le lieu par excellence où il manifeste la gloire de Dieu, la toute-puissance de son amour, reste la Croix. Sur la Croix, il n’accomplit pas de prodige pour se sauver lui-même, mais consent librement à souffrir sa Passion qui le mène à la mort, en gardant jusqu’au bout sa confiance à l’égard de son Père. L’amour de miséricorde qu’il garde pour ceux qui l’ont condamné et l’outragent, est déjà victorieux à la Croix.

En Jésus-Christ crucifié, Dieu rejoint l’humanité jusque dans ce qu’elle a de plus tragique : la finitude, la condition mortelle, le scandale du mal et tout particulièrement la souffrance de l’innocent. En descendant dans nos enfers et dans notre mort, le Christ nous assure de ne jamais nous y laisser seul. Mieux, il s’identifie à nous en ces circonstances pour nous unir à lui. En cela, Jésus « n’est pas venu supprimer la souffrance. Il n’est même pas venu pour l’expliquer. Il est venu pour la remplir de sa présence. » (Claudel)

 

5. La Résurrection du Christ

La Résurrection du Christ est le cœur de la foi chrétienne. En elle est affirmée la réalité de la victoire du Christ sur le péché et sur la mort, la fécondité de sa vie donnée, et par suite, de la nôtre vécue à sa manière. Le Christ est présent auprès de nous, lorsque nous nous réunissons en son nom, que nous écoutons sa Parole, que nous le recevons dans les sacrements. La Résurrection proclame la finalité présente et ultime de notre existence.

Le Christ est vivant : rien ne peut nous séparer de lui, de l’amour qu’il répand, pas même les épreuves, les échecs ou la mort. En cela, Dieu est fidèle à son projet créateur : la vie qu’il donne à l’homme, lui est réellement donnée, pour de bon, pour toujours. Une telle qualité de don permet alors au chrétien de vivre à son tour en ressuscité, libéré de la peur et du doute.

Être chrétien, être baptisé, c’est plonger dans la mort du Christ, mourir à soi-même avec lui, pour ressusciter avec lui, dans une existence décentrée de soi, mais consacrée au Christ.

 

6. La Trinité

Le Dieu des chrétiens est amour. Amour créateur, principe de toute chose, ne manquant de rien : il est Père. Amour sauveur, envoyé auprès des hom­mes, se réjouissant de leurs joies et souffrant de leurs peines : il est Fils. Amour d’alliance, s’inscri­vant au cœur de ceux qu’il aime, source d’inspira­tion : il est Esprit Saint.

Par analogie avec l’amour humain qui conjugue amour de soi, amour d’autrui et amour qui donne la vie, cet amour est trinitaire. C’est l’amour d’un seul Dieu en trois relations : le don du Père, l’accueil de ce don par le Fils, et le débordement de cet amour mutuel.

 

7. L’Eglise, Corps du Christ

Comme Corps du Christ, Peuple de Dieu et Temple de l’Esprit Saint, l’Eglise rassemble dans une même foi et un même baptême, des membres divers, complémentaires. L’unité et la vitalité de ses membres dépend de leur union au Christ, seul capable de faire resplendir sur eux la sainteté de Dieu. Tout en étant composée de pécheurs, l’Eglise rayonne du Christ qui l’a choisie pour être « à la fois le signe et l’instrument de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain. » (LG 1) Pour cela, la Vierge Marie est figure exemplaire de l’Église et du chrétien.

L’Église reçoit du Christ le don et la mission d’annoncer sa Bonne Nouvelle de salut, de prier et célébrer avec lui, de vivre l’Évangile au quotidien par une vie de charité. On n’est pas chrétien tout seul, car cette triple mission ne peut être vécue seul, mais ensemble, en Église.

L’Église souffre de son manque d’unité, entre catholiques, orthodoxes, protestants, anglicans, évangéliques… La prière que le Christ adresse à son Père : « Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé » (Jn 17,22) n’est donc pas encore accomplie. Le dialogue œcuménique témoigne qu’ensemble, nous ne nous en satisfaisons pas.

 

8. Les sacrements

Les sacrements mettent en communion vivante avec le Christ ressuscité. Dans les sacrements, le Christ se rend présent par un geste et une parole de sa vie publique, car sa résurrection nous en rend contemporains. Bénédiction, pardon, guérison, envoi en mission, consécration… autant d’ac­tes de salut du Christ pour aujourd’hui, en direction de son Père et des hommes. Il y associe l’Eglise, et tous les membres de son corps unis à lui moyennant la foi baptismale. Ce n’est donc pas par eux-mêmes ou pour eux-mêmes, que les chrétiens célèbrent un sacrement, mais « par lui – le Christ -, avec lui et en lui » et « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ».

En tout sacrement, l’Esprit Saint consacre le Christ – et nous avec – à son Père et aux hommes. Le baptême et la confirmation nous consacrent prêtre, prophète et roi avec le Christ pour rayonner de lui au milieu des hommes. L’Eucharistie consacre la vie des hommes, ce qu’ils reçoivent de la création et ce qu’ils en font par leur travail.

Pour les catholiques, le mariage est un sacrement, et il consacre à Dieu l’amour d’un homme et d’une femme, reçu de Dieu. De même, l’ordination consacre et envoie au service de l’Église. Plus mystérieux encore, le sacrement du pardon ou des malades consacrent no­tre faiblesse accueillie dans la foi et remise entre les mains du Père.

 

9. La morale : suivre le Christ

La morale est naturelle et non pas spécifiquement juive, chrétienne, ou judéo-chrétienne : pour le bonheur de l’homme, elle donne des règles éprouvées d’attention au prochain et de bien vivre ensemble. Avec le peuple d’Israël, les chrétiens voient la morale comme moyen de répondre à l’amour de Dieu pour l’humanité, puisque les commandements de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain vont ensemble.

Ils voient aussi dans l’effort moral vers le bien et contre le mal, la possible collaboration du chrétien au salut donné par le Christ, l’imitation de sa vie toute donnée aux autres, le fruit de l’union au Christ. Le commandement du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés », induit alors un au-delà de la morale qui va jusqu’à l’amour de l’ennemi, à « tendre la joue gauche » etc…

L’amour préférentiel pour les petits et les pauvres n’est pas optionnel pour le chrétien. Les servir, c’est servir le Christ qui s’identifie à eux : c’est servir Dieu lui-même. Cela s’étend à la recherche de la paix, de la justice, d’une économie au service de l’homme et respectueuse de la Création. L’amour n’est pas que sentiment, passion ou compassion, mais décision et action en vue du bien d’autrui et du bien commun.

10 images pour dire la foi

Voici un diaporama (Powerpoint 6 Mo – téléchargeable en cliquant sur « 10 images…« ) pour dire la foi chrétienne en quelques minutes, en vue d’une catéchèse en accéléré (préparation au mariage ou au baptême, animation auprès de jeunes…). Les pistes de texte d’accompagnement sont disponibles en cliquant ICI. On peut aussi voir chaque image séparément sur un album Picasa :

(1) La Bible, mémoire et guide de la marche de l’homme avec Dieu

Un Dieu qui laisse une trace de sa présence auprès de l’homme, dans la Création et dans l’Histoire.

La Bible, mémoire vive des rencontres faites avec Dieu : un livre ou plutôt une bibliothèque, qui met en contact avec la Parole vivante de Dieu.

La Bible, un guide qui permet de repérer comment Dieu, fidèle à sa promesse, continue de parler aujourd’hui.

. (2) La prière, présence et réponse de l’homme à Dieu

Dieu s’adresse à l’homme, pour que l’homme puisse l’entendre et lui répondre.

La prière donne à l’homme d’être en contact personnel avec Dieu.

Un contact qui peut n’être que de simple présence, d’adoration silencieuse : « Tu es Dieu, et cela me suffit. »

 

(3) Jésus, la Parole de Dieu faite chair

Le point culminant du dialogue de Dieu avec l’homme est atteint en Jésus, la Parole de Dieu faite chair.

Dieu se fait homme, pour que tout homme se découvre enfant de Dieu.

Dieu prend le langage d’une vie d’homme pour se dire.

. (4) La Passion du Christ pour les hommes

Toute la vie de Jésus dit Dieu, y compris l’expérience du scandale du mal, de la souffrance et de la mort.

La Croix de Jésus-Christ est le point culminant de la révélation de Dieu : amour donné jusqu’au bout.

Tout homme, en particulier dans la souffrance, est à l’image de Dieu, icône du Christ.

 

(5) Les sacrements, don de la Vie du ressuscité

La Résurrection, au cœur de la foi en Dieu qui descend dans nos enfers pour nous donner la Vie.

La vie éternelle promise par Dieu, est celle dont vit le Christ ressuscité : rien ne peut nous séparer de lui.

Par les sacrements, le Christ nous communique sa vie, pour que nous aussi, nous nous donnions aux autres.

. (6) Le baptême, plongée dans le Christ

La foi est un risque à prendre, à la suite du Christ : un acte de la raison mue par la volonté, soutenue par la grâce.

Le baptême nous fait plonger dans la foi de l’Eglise.

Par le baptême, nous devenons d’autres Christ, morts au péché, et vivants pour Dieu.

 

(7) Suivre le Christ, la pratique de l’Evangile

Être uni au Christ, se vérifie par l’imitation concrète de sa vie toute donnée aux autres, par l’amour.

L’amour préférentiel pour les petits et les pauvres n’est pas optionnel pour le chrétien.

Servir les petits et les pauvres, c’est servir le Christ qui s’identifie à eux : c’est servir Dieu lui-même.

. (8) La morale, grammaire de l’amour

L’amour n’est pas que sentiment ou passion, mais décision et action en vue du bien d’autrui.

La morale, aussi bien naturelle que révélée – avec le Décalogue donné à Moïse, en donne des règles universelles.

Dieu donne à l’homme la liberté de choisir entre le bien et le mal, de discerner sa vocation.

 

(9) L’Eglise, ensemble pour aller de la terre au ciel

On n’est pas chrétien tout seul, mais ensemble, en Eglise.

Nous sommes à la fois pécheurs, avançant à cloche-pied vers Dieu, et saints, déjà habités par l’amour du Christ.

Le chrétien est appelé à répondre à sa vocation, comme membre unique du Corps du Christ, l’Eglise.

. (10) Vivre de l’Esprit, réenchanter le monde…

Dieu nous donne son Esprit, pour que nous en vivions, en témoignant de son amour pour tout et pour tous.

Annoncer l’Evangile – la bonne nouvelle du Christ vivant – est la tâche et la joie du chrétien.

Le mystère de la Trinité révèle toute l’ampleur de l’amour de Dieu.

Catholique non croyant ?

A propos d’un sondage de 2007 – où seulement une personne se disant catholique sur 2 croit en Dieu – une étudiante m’écrit :

J’avais entendu parler de ce sondage à la radio et trouvant cela ridicule de se dire catholique sans croire en Dieu, j’en avais fait part à mes amis. Certains ne sont pas baptisés et n’ont pas eu d’éducation catholique, ils n’étaient pas très intéressés par ce sujet de discussion.

D’autres sont baptisées, sont allées au catéchisme forcées ou n’y sont pas allées et m’ont dit « et alors ? moi je suis baptisée donc je suis catholique ! » et quand je leur ai demandé : « tu crois en Dieu ? » la réponse était claire : « non ». 

Elles affirment que dès qu’on est baptisé on entre dans l’Eglise catholique et par conséquent on est catholique tout le reste de sa vie. Je suis d’accord avec elles. Cependant lorsqu’on baptise un enfant de quelques mois et qu’on ne lui donne ensuite aucune éducation catholique et qu’il ne croit pas en Dieu, peut-on dire que cet enfant est catholique ?

J’ai l’impression qu’on baptise de plus en plus les enfants pour la tradition, pour faire plaisir aux grands parents, à la famille,…

J’ai l’impression qu’il en est de même avec le mariage. Une de mes amies s’est mariée récemment et cela a occasionné des discussions sur le mariage. Toutes mes amies veulent se marier à l’église pour avoir une belle cérémonie ! Il y en a une qui n’est pas baptisée et les autres lui ont dit « pas de chance, nous on est baptisées, on pourra se marier à l’église. » Cela me révolte un peu que des couples veulent se marier à l’église juste pour la cérémonie. Le principe ce n’est pas de se marier devant Dieu ? Y-a-t-il un intérêt à se marier devant Dieu alors qu’on ne croit pas en lui ? Et à ce niveau là, est-il nécessaire d’être baptisé pour se marier à l’église ?

Mon interrogation la plus profonde reste quand même comment peut-on être catholique sans croire en Dieu ? Le baptême fait-il forcément de nous des catholiques ?

Le plus drôle dans cette histoire, c’est que je ne peux pas (ou presque pas) parler de religion avec mes amies « catholiques » (les rares sujets qu’elles savent aborder sont principalement les sujets sur la contraception et le pape)… Alors qu’avec un ami qui est agnostique je peux en parler comme je veux, il m’écoutera toujours ! Je sais que si j’ouvre la Bible sur un quelconque passage, il sera prêt à en discuter avec moi…

 

Merci pour ces belles questions qui ne sont pas que de la sociologie…

Souvent les extrêmes se rejoignent : un chrétien qui vit profondément sa foi, et un « faux » chrétien qui se contente de dire qu’il est catholique parce qu’il est baptisé sans forcément que cela l’engage à croire, tous deux ont en fait en commun la valorisation du baptême !

Le chrétien qui vit sa foi reconnaît que celle-ci est une chance imméritée, un don gratuit, et qu’elle est bien une « vertu théologale », c’est à dire ayant Dieu comme source. Son engagement chrétien, sa foi, il les vit non pas comme une démarche qui partirait de lui, mais comme une réponse à l’initiative de Dieu de venir à lui, de se communiquer à lui par Jésus-Christ. Alors, il « rend grâce » à Dieu, ce qui signifie que le premier don, la première gratuité vient de Dieu. Aussi, il voit dans son baptême le moment où tout s’est joué, où incompréhensiblement, le Christ l’a choisi pour être membre de son Corps, témoin de sa vie de ressuscité… Il considérera que sa confirmation est moins le moment où lui-même confirme qu’il est bien chrétien ou valide le choix de ses parents de l’avoir fait baptiser, mais plutôt le moment où il laisse Dieu le confirmer comme son fils ou sa fille à la manière du Fils unique. De la sorte, il pourra dire lui aussi qu’il est chrétien parce qu’il est baptisé, confirmé, eucharistié, parce qu’il a reçu la grâce des sacrements de l’initiation qui font de lui un chrétien, c’est-à-dire un « saint » en puissance (il faut lire comment saint Paul s’adresse aux Ephésiens en Ep 1 !) d’une sainteté qui ne relève pas de sa générosité personnelle, mais du fait que Dieu le voit comme tel. Saint Augustin pouvait alors dire : « Devenez ce que vous êtes. » C’est à dire : des saints, parce que le baptême a fait de vous des membres du Christ, des vivants ressuscités avec lui, morts à eux-mêmes pour vivre dans la justice et la sainteté, en sa présence, tout au long de leurs jours (Lc 1,75).

Le fait que les baptêmes des petits enfants se soient généralisés à partir du 5ème siècle relève de ce qui précède : l’initiative de Dieu prime sur la réponse de foi du baptisé. La grâce du baptême rend possible – mais pas de manière automatique – cette adhésion de foi. Mais elle ne la remplace pas ! Le cardinal Lustiger disait à ses jeunes prêtres que le baptême qu’ils donneraient aujourd’hui à tel ou tel enfant pourrait ne montrer sa fécondité en terme de foi que dans… 80 ans.

Cela dit, les sacrements ne sont que les moyens « ordinaires » par lesquels Dieu donne sa grâce. Cela n’exclue pas qu’hors d’eux, hors de l’Eglise, des personnes puissent être touchés par la grâce et ouvrent leur coeur au Christ. Il n’en reste pas moins qu’une telle conversion doit se prolonger sacramentellement, pour signifier de la part du nouveau croyant que c’est bien d’un don de Dieu, avec la médiation du Christ, et de l’Eglise que le Christ a choisie pour être son épouse, que procède sa conversion.

Si donc les extrêmes se rejoignent, les deux attitudes du chrétien de coeur, et de l’autre – que l’on ne devrait pas appeler chrétien -, diffèrent malgré tout dans le rapport qu’ils ont aux sacrements, vus pour le premier comme l’occasion de laisser le Christ faire son oeuvre en lui et en son Eglise « pour la gloire de Dieu et le salut du monde », et pour l’autre, au mieux comme quelque chose d’inutile, au pire comme un droit à revendiquer du fait d’avoir été baptisé : « j’ai le droit de me marier à l’Eglise, d’avoir un prêtre à mon enterrement etc… » Pour le premier, il s’agit de rester greffé sur le cep, branché sur la source, uni au Christ qui donne de devenir ce que l’on a reçu, un autre Christ (alter Christus). Pour l’autre, ce n’est qu’un rite ou un décor dont on a perdu le sens, au risque de le profaner.

Si ces questions t’intéressent, je t’invite à un forum que j’ai lancé sur facebook (« Forum Philo-Théo tala »), avec de la philosophie et de la théologie d’inspiration chrétienne, auquel participent des lycéens et des étudiants.

Credo et dialogue interreligieux

A destination de jeunes de l’aumônerie ou de couples préparant le baptême d’un enfant, voici un diaporama sur le Symbole des Apôtres (cliquer ICI). Ci-dessous, voilà une autre version, contemporaine, d’une profession de foi chrétienne en dialogue avec les autres religions.

Contrairement au texte déroulant ci-haut, il ne s’agit pas d’un « texte d’inspiration catholique » : le pasteur réformé Shafique Keshavjee qui l’a rédigé est aussi l’auteur du roman Le Roi, le Sage et le Bouffon (Seuil, collection Points, 2000, 6€), un très beau livre sur le dialogue interreligieux, avec plusieurs niveaux de lecture, et que j’ai eu offert maintes fois (à partir du lycée).

Cette profession de foi a été partagée en équipe MEJ (20-21 ans), à partir de questions habituelles sur le rapport entre la foi chrétienne et les autres religions.

 

Une confession chrétienne du Dieu vivant

Pasteur Shafique Keshavjee, Lausanne ; texte paru dans la revue « Fidélité » en octobre 2004.

 

Avec tous nos frères et sœurs chrétiens, nous confessons que le Dieu Unique est Père – au-delà de tout et de tous – Fils – s’approchant de tout et de tous – et Saint-Esprit – au-dedans de tout et de tous. Nous confessons que le Dieu trois fois Saint est mystère d’Infinité et de proximité, de communion et de communication, de tendresse et de justice.

Avec nos frères et sœurs en humanité juifs, nous confessons que Dieu est le Créateur de l’univers et qu’il est le Saint.
Et différemment d’eux, nous confessons que le Créateur s’est fait créature et que le Saint s’est incarné.

Avec nos frères et sœurs en humanité musulmans, nous confessons que Dieu est le Tout-Puissant, le Parfait et l’Immortel.
Et différemment d’eux, nous confessons que le Tout-Puissant a accepté d’être fragile, que le Parfait a porté nos imperfections et que l’Immortel, par la mort et la résurrection de Jésus, a transfiguré notre mortalité.

Avec nos frères et sœurs en humanité bouddhistes, nous confessons que la réalité ultime est inexprimable.
Et différemment d’eux, nous confessons que l’inexprimable s’est exprimé, non comme « vide » impersonnel (shunyata) mais comme personnalité qui s’est « vidée » (Kénose).

Avec les religions de l’Orient, nous confessons que Dieu est silence et souffle. Avec les religions juive et musulmanes que Dieu est parole.
Et différemment de toutes, nous confessons que Dieu est tout à la fois silence, parole et souffle, Père, Fils et Esprit, que la source silencieuse s’est faite parole que la parole s’est faite chair et que par le souffle de la parole toute chair peut devenir une parole animée à la louange de Dieu au-delà de tout…

Avec tous nos frères et sœurs en humanité sans religion et de bonne volonté, nous confessons que les droits de l’homme et de la femme sont inaliénables.
Et différemment d’eux, nous confessons que l’humain est image du divin.

Avec l’apôtre Paul et tous les Chrétiens de tous les temps, nous confessons la divinité, l’incarnation, la mort, la résurrection et l’élévation de Jésus, Fils de Dieu reconnu comme Messie, venu et qui vient (cf. Philippiens 2, 5-11). Et cette confession commune nous réjouit intensément.

A propos de la mort…

En réponse à un message reçu sur facebook :

Je ne crois pas en dieu mais pourtant quand je pense à mon père, je prie dieu pour qu’il le fasse revenir. Je ne sais plus où j’en suis. Est-ce que l’au-delà existe ? Comment puis-je savoir si mon père est heureux là où il est ?

 

Je peux d’abord proposer une réponse humaine, avant d’être une réponse croyante, et même chrétienne :

Dès qu’il y a de l’humain, il y a l’intuition inaltérable que ce qui a été vécu ici-bas, les relations, les liens affectifs, les projets, les engagements… doivent bien avoir un prolongement, ou un accomplissement, ou une sanction (positive ou négative) au-delà de la mort. C’est là une exigence de justice inscrite dans le coeur de l’homme, et l’on ne trouve pas cette intuition chez les animaux. Cette intuition est à l’origine des marques de respect que seuls les humains donnent à ce qui reste de ceux qui sont morts, c’est-à-dire aux corps des défunts : les rites funéraires (enterrement, crémation, etc…) sont le signe de ce respect, et sont propres à l’homme, y compris préhistorique. Pourquoi respecter ce qui n’est plus qu’un corps destiné à se dissoudre, s’il n’y a pas l’intuition d’un au-delà de la mort ?

Mais si c’est là une attente inscrite dans le coeur de l’homme, on a le choix entre deux attitudes :

– Refuser cette attente, et la considérer comme une illusion ; croire que la réalité est en fait contraire à notre attente, qu’il n’y a en fait rien à espérer au-delà de la mort, que cette vie mène à une tombe, au néant, au rien, et disparaît progressivement du souvenir de ceux qui restent, que cette vie est donc à proprement parler insensée, absurde. La sagesse serait alors d’en prendre acte, sans se bercer d’illusions « opium du peuple ».

Des penseurs passés et présents (André Comte-Sponville fait partie de ceux-là) ont pris ce parti du désespoir, en affirmant que le sens de l’existence ne peut se trouver qu’à l’intérieur de cette courte parenthèse entre notre naissance et notre mort, et pas au-delà. On pourrait leur objecter que c’est là une optique de « nantis », de gens qui ont la possibilité de diriger leur vie ici-bas, d’en faire quelque chose… Que dire alors à ceux qui ont vécu toute leur existence prisonniers de la misère ou du dénuement, victimes innocentes de l’injustice et de la guerre ? Quel sens trouver à cette vie si tout se joue uniquement ici-bas ? Que dire aussi à ceux qui doivent se résigner à la disparition totale de ceux qu’ils ont aimés ?

– Croire que cette attente humaine correspond à une réalité existante, bonne, désirable, et que le scandale du mal, de l’injustice, de la souffrance et de la mort vient paradoxalement confirmer : car si ce que ces maux contrarient n’existait pas, de quoi ces maux nous priveraient-ils ? pourquoi nous feraient-ils tant souffrir ? C’est justement parce que nous sommes faits pour cette vie pleine, éternelle, juste, affranchie de la mort, que l’expérience de la mort physique et du mal fait scandale. Même si nous n’en pouvons avoir qu’une intuition, même si elle reste un mystère, cette réalité désirée que les philosophies évoquent seulement en termes d’ « immortalité de l’âme », les croyants – et tout particulièrement les chrétiens – osent l’affirmer à partir d’une autre expérience que celle de l’attente du coeur humain : l’événement de la Résurrection du Christ, fêté chaque année à Pâques comme le centre de l’histoire, ce qui lui donne son sens.

Être chrétien…

Samedi dernier, nous avons célébré l’Epiphanie par une joyeuse messe animée par les jeunes, précédée par une après-midi de rencontre pour la préparation à la confirmation (des collégiens de l’Enseignement Catholique), au cours de laquelle nous nous sommes posés la question : « Qu’est-ce qu’être chrétien ? »

Nous avons redécouvert qu’être chrétien est d’abord une révélation et une grâce à accueillir, une déclaration d’amour à entendre et dont Dieu a l’initiative. Le baptême fait du chrétien un prêtre, un prophète et un roi, à l’image du Christ, non par mérite de notre part, mais parce que c’est Dieu qui nous a aimés le premier. Tout vient de Dieu donc, mais de même que les mages se sont mis en route pour suivre l’étoile à la rencontre du Roi, de même est requise de notre part une certaine activité, une disponibilité active, une « pratique » pour cultiver cette amitié que Dieu nous propose et la répercuter auprès de nos frères. Aussi avec les jeunes, commencer par la pratique chrétienne constitue un point de départ concret pour aborder la question de ce qu’est un chrétien, quitte à ce que l’on réfute ensuite l’idée qu’un chrétien puisse être défini par ce qu’il fait ou ne fait pas.

 

D’où ces « points » de pratique proposés dans l’après-midi aux confirmands, pour choisir un ou deux d’entre les moins pratiqués, comme « point concret d’effort » cette année…

– j’ai découvert l’importance d’aimer et d’être aimé,
– j’ai découvert que je suis aimé de Dieu et appelé par lui à devenir saint,
– je prie personnellement et régulièrement,
– je lis la Bible avec foi et respect comme Parole que Dieu m’adresse aujourd’hui,
– je fais grandir ma foi en rencontrant d’autres chrétiens,
– j’ai découvert l’importance des sacrements comme rencontre avec le Christ,
– j’ai fait une démarche de réconciliation en vivant le sacrement du pardon,
– je me sais appelé avec les autres chrétiens à transmettre la foi de l’Eglise,
– je connais au moins une douzaine d’événements de la vie du Christ,
– je connais le Notre Père et d’autres prières comme le Je vous salue Marie,
– je connais le Credo (symbole des apôtres, de Nicée-Constantinople),
– je connais la différence entre résurrection et réincarnation,
– je peux expliquer les titres donnés à Jésus : Christ, Seigneur, Sauveur, Fils de Dieu…
– je sais quels sont les 7 sacrements,
– je sais ce que signifie le « péché », le pardon de Dieu,
– je sais ce qu’est l’Esprit Saint,
– je sais témoigner de ma foi chrétienne par ma manière de vivre,
– je partage régulièrement de mon temps ou de mon argent aux autres,
– je suis capable de pardonner,
– je sais faire la différence entre ce qui est bien et ce qui est mal et agir en conséquence,
– je sais écouter les idées des autres qui ne pensent pas pareil que moi,
– je connais les témoins de la foi, les saints qui m’attirent le plus et pourquoi,
– je sais exprimer ce que je considère comme péché dans ma vie,
– j’ai participé à une retraite ou à une rencontre avec des moines ou des religieux.

 

Mais aussi ce tableau proposé en veillée aux confirmés

 

Parole de Dieu Prière Sacrements Solidarité Morale Mission
Prendre quelques minutes le matin pour lire et méditer l’Evangile du jour (cf. revue « Prions en Eglise » ou « Magnificat ») en gardant en mémoire un verset ou une expression pour inspirer ma journée.

Me faire conseiller un livre de formation chrétienne à lire cette année.

M’abonner à une revue chrétienne (You !, Cahiers pour Croire aujourd’hui, Le Journal Expérimental…).

Participer à un groupe biblique ou à une catéchèse pour jeunes.

Prendre quelques minutes le soir pour « relire » ma journée, en me mettant en présence du Christ, le remerciant pour l’amour donné et reçu, demandant pardon pour les occasions d’aimer ratées, lui demandant d’être avec lui demain.

Prévoir dans l’année un week-end de retraite dans un lieu de prière (monastère, abbaye…).

Trouver un accompagnateur spirituel à rencontrer mensuellement.

M’initier à une prière régulière, quotidienne.

Participer fidèlement à la messe dominicale.

Recevoir le sacrement de la réconciliation une fois par mois.

Me former pour une plus active participation à la messe dominicale (lecture, musique, chant, service de l’autel).

Une fois de temps en temps, participer à une messe en semaine.

Fixer une somme, un temps à donner chaque mois, et m’y tenir.

Me tenir informé de l’actualité, y compris politique, pour être solidaire des joies et des peines de mes frères, dans l’action, ou au moins dans la prière.

Participer à une action de solidarité avec d’autres jeunes (veillée de Noël avec SDF, quête, animation journée CCFD / enfants, collégiens).

Faire l’effort quotidien de reconnaître en chacun un enfant bien-aimé du Père, un frère ou une sœur, surtout en ceux que j’ai du mal à aimer.

Se fixer un point concret d’effort sur tel ou tel défaut ou mauvaise habitude à corriger, et en mesurer les progrès.

Face à une tentation, bénigne ou grave, dans l’hygiène de vie, l’alimentation, les dépenses, la vie affective… prendre le temps de me placer devant le Seigneur, de lui demander conseil dans une prière et d’accueillir la sainteté qu’il veut pour moi.

Participer à un mouvement ou à un service d’Eglise (caté, aumônerie…), comme animateur auprès d’enfants ou de jeunes.

Accueillir les nouveaux au collège, au lycée, dans le quartier, à la sortie de la messe.

Inviter un(e) ami(e) à participer à une messe de jeunes.

Donner, même modestement, ma participation au denier de l’Eglise.

Porter sur soi, avec humilité et fierté un signe d’appartenance au Christ.

Me former pour pouvoir rendre compte de mes raisons de croire.

 

Et enfin, ces extraits de l’épître à Diognète, avec leur traduction en verbes d’action pour aujourd’hui…

 

Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par les coutumes. Ils se conforment aux usages locaux pour les vêtements, la nourriture et le reste de l’existence. Mais toute terre étrangère leur est une patrie, et toute patrie leur est une terre étrangère. Ils se marient comme tout le monde, ils ont des enfants, mais ils n’abandonnent pas leurs nouveau-nés. Ils prennent place à une table commune, mais qui n’est pas une table ordinaire. Ils passent leur vie sur la terre, mais ils sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies, et leur manière de vivre est plus parfaite que les lois. Ils aiment tout le monde, et tout le monde les persécute. En un mot, ce que l’âme est dans le corps, les chrétiens le sont dans le monde. L’âme est répandue dans membres du corps comme les chrétiens dans les cités du monde. L’âme habite dans le corps, et pourtant elle n’appartient pas au corps, comme les chrétiens habitent dans le monde, mais ils n’appartiennent pas au monde. L’âme invisible est retenue prisonnière dans le corps visible; ainsi les chrétiens : on les voit vivre dans le monde, mais le culte qu’ils rendent à Dieu demeure invisible. La chair déteste l’âme et lui fait la guerre, sans que celle-ci lui ai fait de tort, mais parce qu’elle l’empêche de jouir des plaisirs ; de même que le monde déteste les chrétiens parce qu’ils s’opposent à ses plaisirs, sans qu’ils lui aient fait de tort. L’âme aime cette chair qui la déteste, ainsi que ses membres, comme les chrétiens aiment ceux qui les détestent. Les chrétiens sont comme détenus dans la prison du monde, mais c’est eux qui maintiennent le monde. Le poste que Dieu leur a fixé est si beau qu’il ne leur est pas permis de le déserter.

Être comme des frères, parce que Dieu est notre Père.

 

 

Respecter la vie comme don de Dieu.

 

 

Participer ensemble à l’Eucharistie.

 

 

Être un familier de Dieu, par la prière.

 

 

Obéir au double commandement de l’amour, de Dieu et du prochain.

 

 

Être dans le monde, l’aimer, le servir.

 

 

Viser plus haut, désirer davantage.

 

 

Faire découvrir Dieu à travers notre manière de vivre, accepter de croire sans voir.

 

 

Vivre en enfant de Dieu et ce que ça exige : ne pas faire n’importe quoi de sa vie.

 

Accueillir comme un honneur la mission, la vocation à laquelle Dieu nous appelle.