Si Dieu n’existait pas

Si Dieu n’existait pas…

1. Le monde ne serait que de la matière en évolution, de la chimie.

2. L’histoire n’aurait pas de sens, car elle serait sans intention ni projet.

3. Les projets de l’homme se limiteraient à la courte parenthèse de sa vie.

4. La vie ne serait qu’un hasard un peu plus exceptionnel que les autres.

5. L’homme ne serait qu’un animal plus évolué, lui aussi destiné à disparaître.

6. La mort rendrait absurdes les efforts de l’homme pour vivre en juste.

7. Au delà de la mort, il n’y aurait de compte à rendre à personne.

8. Tout serait permis : l’égoïsme serait plus raisonnable que l’altruisme.

9. Nous serions soumis à la loi de l’intérêt, du plaisir ou de la force.

10. Malheur aux faibles, aux pauvres, aux limités, aux sans défense.

11. Chacun serait seul dans le scandale et l’absurde de la souffrance.

12. La messe ou la prière ne seraient qu’une totale perte de temps.

 

Mais parce que Jésus-Christ est vraiment le Fils de Dieu…

1. Tout ce qui existe vient de Dieu, comme fruit de Son amour.

2. L’histoire des hommes est « sainte », car c’est là que nous Le rencontrons.

3. La vie ici-bas s’accomplit en vie éternelle avec Lui.

4. Le don de la vie est Son plus beau cadeau, sa création, ce qu’Il veut.

5. L’homme a une valeur sacrée, parce que créé à Son image.

6. Tout effort de justice trouve sens en Son amour plus fort que la mort.

7. La mort est l’épreuve décisive avant les retrouvailles avec Lui.

8. Être en relation avec Lui nous oblige à l’aimer en notre prochain.

9. Nous répondons à Son amour en servant les plus petits.

10. Heureux les pauvres de coeur, le Royaume des cieux est à eux.

11. Il partage nos souffrances, et nous donne de les dépasser par l’amour.

12. Prier Dieu ou Le célébrer est la plus haute activité de l’homme.

Heureux…

Il est heureux que dans l’Evangile selon saint Matthieu, le mot inaugural de l’enseignement de Jésus soit le mot « heureux ». Rien d’étonnant : « Evangile » signifie « Bonne nouvelle ». La volonté du Père est que l’homme soit heureux. Les Béatitudes annoncent un bonheur profond, et certain, car fondé sur la fidélité de Dieu à son projet. Cette certitude de foi devrait bousculer le secret désespoir qui nous habite parfois : lorsque sans nous l’avouer vraiment, nous ne croyons pas – ou plus – au bonheur ; lorsque par faux réalisme, nous le bornons à notre mesure, aux satisfactions immédiates que la vie laisse à notre portée.

De fait, les Béatitudes nous bousculent : alors que nous cherchons la sécurité, la satisfaction de nos besoins, l’autosuffisance… elles proposent un bonheur qui suppose un manque persistant, un désir encore tendu en avant, une mise en marche active. André Chouraqui, en juif érudit, traduit « Heureux… » par « En marche… », comme si le malheur consistait à s’arrêter, à renoncer à avancer vers ce Royaume dont Dieu est le centre. On s’arrête, soit parce qu’on le croit inaccessible, soit parce qu’on l’a remplacé en nos cœurs par un royaume moindre dont nous serions le centre… Or cette marche vers le Royaume de Dieu, non seulement n’est pas vaine, mais elle donne d’expérimenter la proximité de Dieu en Jésus-Christ présent à nos côtés, l’ouverture aux autres, la certitude qui prévaut par delà les épreuves que « la victoire est certaine » – selon les mots du pasteur D.Bonhoeffer juste avant son exécution par les nazis.

Il faudrait percevoir ce qu’il y a d’infiniment désirable dans ce Royaume des cieux non seulement promis au futur, mais assuré au présent, pour accueillir avec joie le programme de vie des Béatitudes. Ce programme n’est rien d’autre que celui de Jésus lui-même, pour nous introduire dans son Royaume : un Royaume où être pauvre de cœur rend capable d’accueillir toute chose comme un don ; où la douceur et la miséricorde sont victoires sur la violence et sur le mal ; où les yeux sont lavés par des larmes de repentir et de compassion ; où la faim et la soif de justice et de paix font participer à la passion de Dieu pour l’homme ; où la pureté de cœur donne de tout voir avec le regard de Dieu, et de voir Dieu en toutes choses ; où la valeur de la vie est à la mesure de ce pour quoi on est prêt à la risquer, à la donner.

La marche vers ce « Royaume » se joue dès à présent dans notre rapport au monde et aux autres, mais ce qui rend cette marche persévérante et heureuse, heureusement persévérante, c’est d’avoir son terme – et d’être déjà – dans ce qui est l’objet même de l’Evangile : obtenir la miséricorde de Dieu, voir Dieu, être fils de Dieu, entrer dans cette terre promise qu’est le Royaume de Dieu, manifesté en la personne de Jésus.

La calligraphie en illustration est de Georges Unal (Rodez, 05 65 75 91 56)